lundi 17 décembre 2012

Tu as couru sur le chemin

Aujourd'hui, tu as couru sur le chemin de l'école.
Je n'ai pas eu à te traîner tenir fermement la main pour te faire avancer.

Tu as bavardé, chanté. "Maman, je dirai à Maitresse M. qu'on a acheté les serviettes pour le goûter de Noël et même qu'elles sont belles!"
Tu as regardé tout autour de toi sur le parking "Oh Maman t'as vu? La voiture blanche, elle va beaucoup plussse vite que la verte! et la grise, t'as vu les grosses roues de la grise?"
Je t'ai regardée, étonnée de retrouver ma petite fille joyeuse et volubile.
Envolée, la petite fille mutique que j'accompagne tous les matins depuis septembre?
Vrai de vrai?

Tu as accepté de mettre ton Doudou dans ton mini-sac à dos.
Tu as couru jusqu'au portail et tu avais une mine réjouie en constatant que tu étais la première "J'ai gagné Maman!!!"
Un petit garçon t'a rejoint. Tu as couru avec lui, tu lui as parlé. Vous avez débattu pour savoir qui courait le plus vite et qui avait gagné. Tu as tourbillonné autour de moi, et continué à jouer quand d'autres enfants se sont amassés près de l'entrée.
Envolée, la petite qui se cache dans mes jambes et ne parle à personne?
Vrai de vrai?

La directrice a ouvert la porte, tu as couru encore. Juste avant d'essuyer tes pieds sur le paillasson, tu as glissé ta petite main dans la mienne, doucement, juste pour se tenir chaud.
Envolée, cette petite main crispée qui s'agrippe, envolée cette petite fille qui me demande de la  prendre dans mes bras, de la porter jusqu'à l'entrée de la classe?
Vrai de vrai?

Tu es partie devant, pour ouvrir la porte du couloir et atteindre ta classe. Tu as ralenti un peu en entrant dans le vestiaire, regardé tout autour de toi pour savoir qui était arrivé de la garderie. Je t'ai aidée à ôter ton manteau, tu as retiré toi même tes bottes et enfilé tes chaussons.
Envolée, la petite fille pétrifiée au milieu de la foule, que je déshabillais tel un pantin?
Vrai de vrai?

Dans un excès d'optimisme, j'ai cru qu'on pourrait oublier Doudou dans le sac. Mais tu as commencé à te tordre, à esquisser un demi-tour devant l'entrée et tu l'as réclamé. J'ai échangé un regard avec ta maîtresse, puis j'ai croisé le tien. J'y ai vu toute l'angoisse que tu domptais depuis ce matin, cette peur que tu maîtrisais enfin et qui menaçait de te submerger de nouveau. J'ai plongé ma main dans le sac et gravé dans ma mémoire le sourire qui est apparu sur ton visage quand Doudou en est sorti. Un sourire de confiance, un sourire qui disait "ça va aller".
Envolée, la petite fille au visage terrifié, toute renfermée sur elle-même?
Vrai de vrai?

Un dernier câlin avant de se quitter, je t'ai glissé à l'oreille "A ce soir, amuse-toi bien". Tu as planté un gros bisou sonore sur ma joue, tu m'as souri, "A ce soir, Maman!" et tu es entrée en classe, sans te retourner.
Oubliés, les encouragements d'un ton faussement enjoué, les câlins à répétition avant de se quitter ("un dernier, Maman!"), la maîtresse qui te retient alors que je pars vite vite sans me retourner?
Vrai de vrai?

Je suis retournée à la voiture d'un pas plus léger.
Aujourd'hui, je n'ai pas pleuré.
Aujourd'hui, 101ème jour depuis ta toute première rentrée scolaire, je t'ai retrouvée.
Et si mes yeux se sont légèrement embrumés, c'était juste de la joie et du soulagement mêlés. Je suis tellement fière de toi ma Framboise. Tu es si forte.

Aujourd'hui, tu as couru sur le chemin.
Vrai de vrai.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire